 
  La garçonne, encres sur papier, 65 x 50 cm, 2015
Ils montent sur  l’estrade comme on entre dans l’eau. 
    Laissent tomber le linge  qui recouvre leur corps.
    Poses rapides. Trente  secondes. 
    Puis une autre. Trente  secondes. Une autre encore. 
    Corps tendus, lumineux,  ouverts, offerts. 
Deux minutes. Cinq  minutes. Dix minutes. Une heure. 
    Avec le temps de pose  qui s’allonge, le corps s’alourdit.
    Longues méditations  engourdies, une heure et demie, 
    l’après-midi.
    Dans l’atelier saturé de  silence, 
    se noue un lien étrange entre artistes et modèle.
    
    Fait de pudeur et  d’humilité, d’intensité de l’attention,
    de densité de la  concentration.
    De solitude aussi devant  la dureté de la tâche. 
Sur le corps immobile,  généreusement abandonné, 
    le regard se perd,  l’esprit vagabonde.
    C’est à ce moment-là que  j’aime capter leurs visages. 
    Transparence d’un  instant éphémère.
    Urgence d’un combat bref  et violent, 
    avec le temps, avec la  matière.
Ce que j'aime, c'est prendre  des risques, me mettre en déséquilibre.
    Supports de  récupération, outils de fortune,
    matériaux divers et variés,
    encres de Chine, brous,  encres d'écoliers.
    Pour tenter de saisir,  en quelques traits, 
    un instant de vie  suspendu dans le temps. 
    Juste ici, et  maintenant.